Les montagnes offrent bien plus que des panoramas grandioses et de l’air pur. Ces milieux naturels préservés regorgent également de trésors végétaux, souvent méconnus du grand public. En tant que passionnée de nature, j’ai toujours été fascinée par les plantes médicinales sauvages et leurs vertus thérapeutiques. Lors de mes randonnées, j’ai appris à reconnaître, cueillir et utiliser quelques-unes d’entre elles, dans le respect de la biodiversité. Ce guide pratique s’adresse aux débutants qui souhaitent s’initier à la cueillette de plantes médicinales en montagne, tout en adoptant une démarche éthique et responsable.
Pourquoi cueillir des plantes médicinales en montagne ?
Les plantes montagnardes ont la particularité de pousser dans des conditions climatiques extrêmes : vent, froid, forts rayonnements UV… Pour survivre, elles développent une richesse en principes actifs bien supérieurs à leurs cousines des plaines. Cette concentration en composés bénéfiques leur confère des propriétés médicinales reconnues.
Cueillir soi-même les plantes offre aussi une alternative naturelle et gratuite aux médicaments industriels. Cela permet de renouer avec un savoir ancestral et d’intégrer des solutions douces dans notre quotidien. Toutefois, cette pratique requiert des connaissances de base pour éviter les confusions dangereuses et préserver l’environnement.
Principes de base pour une cueillette responsable
Avant de partir à l’assaut des sentiers, il est essentiel de se familiariser avec quelques règles qui garantissent une cueillette éthique. Voici les principes que je respecte systématiquement :
- Ne cueillir que les plantes dont l’identification est certaine.
- Prélever avec parcimonie : ne jamais vider un site, prélever moins de 10 % d’une population.
- Éviter de cueillir des plantes rares, protégées ou en danger.
- Utiliser un couteau ou une paire de ciseaux pour éviter d’endommager la plante mètre.
- Choisir un lieu éloigné de toute source de pollution (routes, pâturages traités, stations de ski pendant l’été).
- Respecter la réglementation locale : certaines réserves naturelles interdisent toute cueillette.
J’emporte toujours avec moi un petit guide de reconnaissance, un sac en toile, et parfois une loupe de terrain pour bien observer les détails botaniques, tels que la forme des feuilles ou l’implantation des fleurs.
Quelques plantes médicinales sauvages faciles à identifier
Voici une sélection de plantes que je rencontre fréquemment lors de mes randonnées dans les Alpes et les Pyrénées. Toutes sont relativement faciles à reconnaître et présentent un intérêt médicinal bien documenté.
L’arnica montana (Arnica des montagnes)
Cette plante emblématique des zones subalpines pousse entre 800 et 2 500 mètres d’altitude. Elle se reconnaît à sa fleur jaune-orangé ressemblant à une grosse marguerite, et à ses feuilles basales disposées en rosette.
Utilisation : l’arnica est réputée pour ses effets anti-inflammatoires. Elle s’utilise uniquement en usage externe, sous forme de macérations huileuses ou de pommades, pour soulager les contusions, entorses et douleurs musculaires. Attention, l’ingestion est toxique !
Le millepertuis perforé (Hypericum perforatum)
Souvent présent sur les pentes exposées au soleil, le millepertuis se distingue par ses petites fleurs jaunes à cinq pétales, et ses feuilles criblées de minuscules points translucides.
Utilisation : cette plante est utilisée en huile de macération pour apaiser les brûlures légères et coups de soleil. En tisane ou teinture, elle est réputée pour ses effets anxiolytiques et antidépresseurs légers. Toutefois, elle peut interagir avec de nombreux médicaments.
La gentiane jaune (Gentiana lutea)
Imposante et majestueuse, la gentiane se reconnaît à sa tige robuste, ses grandes feuilles opposées et ses bouquets de fleurs jaune vif. On la trouve surtout dans les prairies d’altitude.
Utilisation : sa racine amère aide à la digestion et stimule l’appétit. Elle est utilisée en décoction, en teinture ou transformée en liqueur digestive.
Attention : la cueillette de la gentiane est très réglementée, car il s’agit d’une espèce protégée dans certaines zones. Préférez l’observation à la récolte.
L’achillée millefeuille (Achillea millefolium)
L’achillée pousse aussi bien dans les pâturages que sur les talus rocailleux. Elle se reconnaît à ses feuilles finement découpées, presque plumeuses, et ses corymbes de petites fleurs blanches ou rosées.
Utilisation : en infusion, elle apaise les troubles digestifs, régule le cycle menstruel et possède des propriétés hémostatiques. Elle est également anti-inflammatoire et cicatrisante en usage externe.
L’ortie dioïque (Urtica dioica)
Connue pour ses piqûres urticantes, l’ortie est injustement mal aimée. Pourtant, elle regorge de vertus et pousse abondamment jusqu’à 2 000 mètres d’altitude.
Utilisation : riche en fer, silice et vitamines, elle est utilisée pour reminéraliser l’organisme. On la consomme en soupe, en tisane, ou on en fait des extraits pour stimuler les défenses immunitaires.
Comment transformer les plantes récoltées ?
Une fois chez soi, les plantes doivent être rapidement séchées, conservées ou transformées. Voici quelques méthodes que j’applique régulièrement selon les propriétés à valoriser :
- Infusion : feuilles et fleurs sont séchées à l’abri de la lumière, puis utilisées pour faire des tisanes médicinales.
- Macérat huileux : les fleurs (comme le millepertuis ou l’arnica) sont plongées dans une huile végétale exposée au soleil pendant plusieurs semaines. Cela permet d’extraire les principes actifs liposolubles.
- Teinture-mère : les parties actives sont mises à macérer dans un alcool de qualité pendant trois semaines. Cette méthode est adaptée aux plantes très concentrées comme la gentiane.
Je conseille vivement aux débutants de tenir un carnet de bord : date et lieu de cueillette, usage réservé, réalisation de préparations… Cela permet de suivre l’efficacité des plantes et d’ajuster l’utilisation selon les besoins du moment.
Se former et progresser en toute sécurité
La cueillette de plantes sauvages requiert patience et apprentissage. Pour éviter les erreurs, il est essentiel de se former progressivement :
- Participer à des sorties botaniques encadrées par des herboristes ou ethnobotanistes locaux.
- Se procurer un guide régional illustré, spécifiquement dédié aux plantes médicinales de montagne.
- Rejoindre des groupes d’échange entre amateurs (associations, forums en ligne, réseaux sociaux responsables).
- Suivre des stages courts en herboristerie ou en reconnaissance des plantes comestibles.
Ce lien direct avec le vivant, cette connexion au rythme des saisons et à la biodiversité permet non seulement de prendre soin de sa santé mais aussi de nourrir un rapport respectueux au monde naturel. La montagne m’a appris que l’humilité et l’observation sont les premiers pas vers une cohabitation harmonieuse avec notre environnement.
Bonne cueillette, et n’oubliez jamais : chaque plante compte.
Lola Rivière